Patrice Pecqueur « Nous faisons donc le pari d’intégrer la meilleure division »

(Une – Crédits Photo : Loïc Cousin)

Interview de Patrice Pecqueur

entraineur de Bordeaux

Tout comme pour Aix en Savoie, la Fédération Française de Natation a offert la possibilité à Bordeaux de monter en élite la saison prochaine grâce à sa seconde place. Si les aixois ont préféré rester en Nationale 1 pour le prochain exercice (voir l’article « Jean-Sylvain Karsenti nous donne la décision d’Aix en Savoie sur la montée en élite« ), l’USBB a décidé, quant à lui, de tenter l’aventure au plus haut niveau.

Nous avons contacté l’entraineur bordelais, Patrice Pecqueur, qui nous en a dit plus sur cette décision.

France Water-Polo : La fédération a statué sur une saison blanche. Il n’y a pas de sacre mais les classements ont été arrêtés à la date du 13 mars. En terminant seconds de la Nationale 1 il vous a été proposé de monter en élite et vous avez décidé d’accepter. Qu’est ce qui a motivé cette décision ?

Patrice Pecqueur : Pour pouvoir se développer, le Water-Polo bordelais a besoin de visibilité. Nous faisons donc le pari d’intégrer la meilleure division nationale masculine pour essayer de mettre un coup de projecteur sur la discipline à Bordeaux et dans sa métropole.

FWP : Quels ont été les facteurs de votre belle saison ? Sur quels points forts l’équipe s’est appuyée pour décrocher cette deuxième place ?

PP : Bien que faisant partie des plus petits budgets de la division, l’équipe que nous avons réussie à constituer pour cette seconde saison de Nationale 1 de rang, après avoir obtenu une honorable 6ème place en 2018-19, était homogène et complète. Tous les postes étaient notamment doublés mêlant joueurs expérimentés et jeunes joueurs. Nous étions sur une très bonne série avant l’arrêt du championnat avec huit victoires de suite dont une sur le leader aixois. Une série importante pour la fin de saison s’annonçait avec les déplacements à Moulins et à Livry-Gargan entrecoupés par la réception de Mulhouse. Il est dommage que nous n’ayons pas pu voir ce que cela aurait donné. Bref, pour revenir à la question initiale, je crois que Xavier, mon assistant, et moi avons pu nous appuyer sur un collectif, constitué d’un noyau de joueurs « brunosiens », et par le fait d’évoluer en grand bassin à domicile.

Crédits Photo : Loïc Cousin

FWP : Il semble y avoir une grande différence entre la Nationale 1 et l’Elite. Pensez-vous avoir les armes pour rivaliser ? Quelle est pour vous la différence entre ces deux divisions du point de vue du jeu ?

PP : Par définition, il existe une différence de niveau dès lors qu’une équipe accède à une division supérieure. L’USB a mis du temps pour réussir à se stabiliser en Nationale 1. En tant qu’entraîneur, j’ai connu quatre accessions de Nationale 2 en Nationale 1 avant de réussir le maintien dans l’antichambre de l’Elite. Alors, bien sûr qu’il existe une différence de niveau entre la Nationale 1 et l’Elite, bien sûr que l’USB aura du mal à rivaliser avec le gotha du Water-Polo français mais c’est le prix à payer pour progresser. J’ai côtoyé la « première division » entre 1988 et 2005 avec Lille, Tourcoing et Douai, la grande différence qui existe entre un club habitué à jouer en Elite et l’Union Saint-Bruno est la structure, le cadre, permettant aux joueurs de se préparer dans les meilleures conditions pour engranger les points le samedi. Vous noterez que l’USB évoluait en Nationale 1 sans joueur ni entraîneur professionnel. Cela ne veut pas dire que nous faisions preuve d’amateurisme pour autant mais personnellement, je fais le pari de la structuration inversée. Beaucoup me disent que ce pari est risqué et ils ont raison. On m’a souvent collé l’étiquette d’entraîneur raisonnable. Les gens qui pensent cela ne me connaissent donc pas car comme chaque sportif, j’aime relever des défis. Lorsque j’ai pris les commandes de l’équipe masculine de l’USB, j’ai vécu un drôle de baptême du feu avec autant de défaites que de matchs joués (20) durant une saison de Nationale 1. La situation ne sera donc pas nouvelle en ce qui me concerne. Cela sera différent pour mes joueurs, à charge pour moi de les accompagner au mieux dans cette introspection. En Elite, cela va plus vite dans les déplacements, cela shoote plus fort et plus précis, c’est physiquement plus costaud notamment dans l’axe et les phases tactiques sont mieux huilées. Bref, on change de monde !

FWP : De quelles ressources supplémentaires (aussi bien financières qu’humaines) allez vous avoir besoin ?

PP : La réponse que je vais faire ici va paraître stupide mais dans un premier temps, j’émets le souhait que la municipalité dote le club de cages dignes de ce nom, et dans un nombre suffisant, d’espaces plus importants et d’un affichage fixe à la piscine Judaïque-Jean Boiteux pour que toutes les catégories puissent jouer au polo dans de meilleures conditions. Mécaniquement, mais il va falloir voir avec les conséquences de la crise du coronavirus, notre subventionnement public va augmenter. Cela nous permettra notamment de faire voyager notre équipe espoir. Nos jeunes vont enfin pouvoir connaître un vrai championnat national, le tout au contact des meilleurs. C’est aussi pour cela que le club accepte la montée en Elite. C’est une sorte d’investissement car je n’oublie pas que nos derniers bons résultats sont en partie la conséquence d’une finale nationale U15 vécue avec la génération des joueurs nés en 1999. Enfin, sauf si des partenaires privés nous le permettent, notre équipe ne comptera aucun joueur professionnel. En revanche, pour tenir le choc, il faudra renforcer notre équipe. Les jeunes joueurs qui souhaitent découvrir le championnat Elite avec du temps de jeu seront les bienvenus à Bordeaux dans la limite de nos possibilités d’accompagnement. Je sais qu’ils sont nombreux mais je sais aussi qu’un bon nombre de clubs de l’Elite ne leur permettent pas de développer leur potentiel actuellement.

FWP : Vous êtes en constante progression. Il y a deux ans, vous évoluiez encore en Nationale 2 et maintenant vous êtes en passe de jouer en Élite. Quelles sont les ambitions du club à moyen terme ?

PP : Les ambitions du club sont de se structurer de manière à évoluer de manière durable au meilleur niveau possible et de permettre aux jeunes bordelais de prendre plaisir à pratiquer ce sport « de dingues » qu’est le Water-Polo.

Crédits Photo : Loïc Cousin

FWP : Avec Nice, vous serez donc le second club à être représenté en élite masculine et en élite féminine. Est-ce que Bordeaux est en train de devenir un nouveau pôle du Water-Polo français ?

PP : N’allons pas trop vite en besogne dans le domaine. Personnellement, je ne vais pas verser dans l’euphorie avec ce repêchage. Nous sommes conscients de prendre des risques. Tout peut donc aller très vite dans le sens inverse. Cependant, le simple constat de placer l’USB à la hauteur de l’ONN pour la saison 2020-2021 est une vraie satisfaction. La vraie performance s’appréciera dans la régularité. Pour le moment, nous en sommes encore loin.

Actualités 20 avril 2020