Litige Ligue – FFN : qu’en est-il ?

La LPWP (Ligue Promotionnelle de Water-polo) et la FFN (Fédération Française de Natation) sont en conflit depuis le début de la saison notamment en ce qui concerne l’organisation du championnat de Pro A Féminine.

Suite à la décision de la FFN de suspendre sa subvention auprès de la ligue d’une part et de reprendre la main sur l’organisation de la Pro A Féminine d’autre part, une demande de conciliation a été faite le 23 octobre dernier par la Ligue (ainsi que par plusieurs clubs de Pro A masculins et féminins) auprès du CNOSF (Comité National Olympique et Sportif Français).

L’audience s’est déroulée le 14 novembre 2017 et le CNOSF à proposé une conciliation afin de mettre un terme au litige opposant Fédération et Ligue.

A l’aide du compte rendu de séance, nous allons tenter de résumer de manière succincte la séance en donnant quelques éléments permettant à chacun de comprendre la situation.

Qui était présent ?

Pour le CNOSF

  • Fédéric LENICA, conseiller d’Etat, désigné par le président de la conférence des conciliateurs
  • Hubert MARQUE et Jules THIREL-DUPUY, responsable et stagiaire sein du service de conciliation

Pour la LPWP

  • Marc CROUSILLAT, président
  • Franklin LEPAGE, secrétaire général
  • Prosper ABEGA, avocat

Pour la FFN

  • Julien ISSOULIE, directeur technique national
  • Jean-Jacques BEURRIER, président délégué
  • Marie JAMET et Antoine DURAND, juristes au sein de la FFN

Quelques éléments de compréhension

Selon l’article L. 131-14 du code du sport, la gestion du Water-polo et de ses compétitions a été déléguée à la FFN.

  • 1er décembre 2012 : Création de la Ligue promotionnelle de Water-polo sous forme d’association.

Elle se décrit, en référence à un nouvel article des statuts de la FFN (article qui s’est avéré non retranscrit dans les statuts de la FFN) comme un « organisme responsable de la gestion des activités du Water-polo (Championnats de France Elite) par délégation du comité directeur de la FFN. »

Lors de son assemblée générale du 20 avril 2013, la FFN a précisé que la LPWP était aussi responsable de la promotion de ces championnats.

Où est le problème ?

En juin 2017, les clubs de Pro A féminine et la FFN se seraient accordés sur une formule pour le championnat 2017-2018. Seulement, la LPWP aurait décidé de modifier cette formule.

Apprenant très tardivement la formule proposée par la LPWP, la Fédération et la Direction Technique ont mis en avant un surcoût important de la formule proposée. En outre, la DTN pointait aussi un intérêt sportif très mesuré à jouer un championnat aller/retour complet au regard du niveau très hétérogène des équipes de tête et celles entrant dans la division.

Résultat, deux formules de championnat sont proposées aux clubs.

Ainsi début septembre une réunion entre les parties a eu lieu pour trouver une solution. D’après la FFN, la LPWP était chargée de la communication de cette nouvelle formule validée par les deux parties. Seulement après plusieurs jours de silence de la ligue, c’est la FFN qui a du diffuser l’information auprès des clubs concernés.

Le 5 octobre, par courrier, le président de la FFN a rappelé le différent qui les oppose avec la LPWP et aussi indiqué au président de la LPWP que la procédure de création de la Ligue ne respectait pas les dispositions du code du sport, et que de ce fait la FFN ne pouvait déléguer l’exercice des missions de service public au bénéfice d’une Ligue qui n’est pas professionnelle et que les statuts FFN ne prévoyaient pas l’existence d’une telle ligue. De plus, le président de la fédération a précisé qu’aucune convention n’avait été signée entre les deux entités, ce qui empêchait la FFN de verser une subvention.

Au lendemain de ce courrier, le 6 octobre, la LPWP a formulé une première demande de conciliation auprès du CNOSF, mettant en avant leur volonté de répartir les compétences entre FFN et LPWP. Cette demande fut jugée irrecevable car la Ligue ne pouvait pas être considérée comme une association sportive et donc n’avait pas la possibilité de formuler ce type de demande (Article L. 141-4 du code du sport).

Quelle est la décision du CNOSF ?

La LPWP, une Ligue professionnelle ?

Les Ligues professionnelles sont créées par les fédérations pour « la représentation, la gestion et la coordination des activités sportives à caractère professionnel des associations qui leur sont affiliées et des sociétés sportives »(Article L. 131-2 du code du sport), ce qui est le cas du Water-polo.

Après l’analyse de la situation, le CNOSF ne reconnait pas la LPWP comme Ligue professionnelle pour plusieurs raisons :

  • Après analyse des statuts de la FFN, ceux-ci ne prévoient pas la faculté pour celle-ci de créer une ligue professionnelle.
  • La LPWP ne dispose pas de règlement intérieur. Son comité directeur ne comporte aucune personne qualifiée et n’a jamais créé de commission électorale ainsi que d’organe de contrôle administratif, juridique et financier de ses membres.
  • Les statuts de la LPWP n’auraient pas été approuvés par l’assemblée générale de la FFN et fait l’objet d’un arrêté du ministre chargé des sports ayant validé leur conformité.
  • Aucune convention n’est présente entre la FFN et la LPWP précisant la répartition des compétences entre les deux parties.

La Ligue peut-elle demander une conciliation ?

Selon l’article L 141-4 du code du sport, le CNOSF peut se voir attribuer une mission de conciliation dans des conflits opposant licenciés, agents sportifs, associations et sociétés sportives et fédérations agréés (hors faits de dopage).

Non, mais…

Après l’analyse du CNOSF des statuts de la LPWP, celle-ci ne peut pas formuler en son nom une demande. Cependant, cette démarche auprès du CNOSF a été faite par la Ligue ainsi que de nombreux clubs de Pro A masculine et féminine qui ont eux qualité pour former cette demande (toujours d’après l’article L141-4).

Néanmoins, le CNOSF s’est posé la question de l’intérêt des clubs à formuler cette demande au nom de l’article 141-15 du code du sport qui stipule que « le demandeur doit avoir un intérêt direct et personnel à agir ».

Sur le refus de la FFN de verser la subvention à la Ligue ?

Etant donné qu’il s’agit d’une subvention destinée à assurer le fonctionnement de la Ligue, les clubs ne sont pas directement destinataires de cette subvention fédérale, son défaut de versement ne modifie à aucun moment leur situation juridique. Ainsi le CNOSF juge que les clubs n’ont pas d’intérêts directs et personnels à contester cette décision.

Sur la reprise en main de la gestion de la Pro A féminine ?

Seuls les clubs de l’USB Bordeaux et Lille MWP sont concernés par ce sujet, ayant tous les deux une équipe engagée dans ce championnat. A partir de ceci le CNOSF a dans un premier jugé irrecevable la contestation des autres clubs (masculins) concernés par cette conciliation.

Sur la répartition des compétences entre Ligue et FFN

Selon l’article 131-12 du code du sport, « la règlementation et la gestion des compétitions relèvent de la compétence de la ligue professionnelle ». Or la LPWP n’est pas une ligue professionnelle.

C’est donc au sein des textes et statuts de la FFN que sont définies ces compétences. Cependant, aucun texte ne mentionne l’existence de la Ligue. Celle-ci n’apparait que dans les règlements annuels water-polo 2017-2018 (site internet FFN), où l’article 8.1.1 stipule que « par délégation du Comité Directeur de la FFN, la LPWP a compétence pour organiser et pour gérer la division Pro A féminine ».

Le CNOSF a par ailleurs constaté que c’est bien la LPWP qui a géré les championnats de Pro A masculins et féminins depuis la saison 2013-2014 et qu’en l’absence de tout retrait de cette délégation, il revenait bien à la Ligue d’organiser ce championnat en constatant par la même occasion que la gestion du championnat masculin ne lui avait jamais été contestée.

Quid de cette saison ?

Le championnat de Pro A féminin ayant déjà débuté selon la formule proposé par la FFN (souhaitant privilégier les intérêts de l’équipe nationale), il est très compliqué de modifier une nouvelle fois la formule.

Pour cela le CNOSF propose à l’USB Bordeaux et Lille MWP de s’en tenir à la formule actuelle tout en précisant qu’il appartient toujours à la Ligue de gérer ce championnat.

Et après ?

Après l’analyse de la situation, le CNOSF propose deux solutions pour l’avenir afin de structurer les championnats de Pro A :

  • Créer une véritable Ligue professionnelle dans le respect du code du sport.
  • Réintégrer la gestion des championnats au sein d’une commission de la FFN, qui acterait de fait la disparition de la Ligue.
Actualités 4 janvier 2018