Pascal Bouchez : « Je suis devenu arbitre sur un malentendu… »
Interview de Pascal Bouchez
Réalisée par France Water-polo
Pascal Bouchez a commencé le Water-polo en tant que joueur au Cercle des Nageurs d’Aulnay sous-bois en 1970. Il a également joué à Noisy le Sec, à Rosny sous Bois (avec notamment Gérard VENEAU) et enfin à Charenton. Il succède ensuite à Guy ALIMONDO comme entraineur de l’équipe Féminine de Charenton qui évoluait alors en Nationale 1.
Pascal se tourne ensuite vers l’arbitrage et est aujourd’hui l’un des meilleurs arbitres français. Cela fait bientôt 23 ans qu’il officie au plus haut niveau. Pour son premier match en N1A (Ancienne Pro A), il avait arbitré la rencontre entre les Enfants de Neptune de Tourcoing et le Cercle des Nageurs de Marseille, avec Patrick CLEMENON, lors de la saison 1993-1994.
Depuis l’existence des classements effectués par la Ligue (15 ans), il a été classé à 11 reprises dans la meilleure paire arbitrale avec, entre autres, Christophe VANHEMS, Pierre BONNAY et Benjamin MERCIER.
Pascal a également officié sur la scène internationale, mais devra y mettre terme à la fin de l’année civile (2017), la LEN ne permettant plus d’arbitrer après 55 ans. Les Universiades étaient donc son dernier tournoi international. Il pourra encore siffler des matchs de World League ou Europa Cup jusqu’à fin Décembre.
A titre personnel, Pascal partage sa vie avec Aurély Blanchard, elle aussi arbitre international. Ironie du sort, c’est elle qui a pris sa place, la saison dernière, dans la meilleure paire arbitrale avec Benjamin Mercier… La relève semble bien assurée. Il avait tout de même terminé 3ème du classement 2016-2017.
Pascal a bien voulu répondre à quelques questions pour France Water-polo et nous le remercions.
Quand as-tu commencé à arbitrer et qu’est ce qui t’as poussé à te lancer là dedans ?
Je suis devenu arbitre sur un malentendu… Une soirée était prévue avec Pierre BONNAY, Bruno BOUST et Jean-Jacques PORTE. Nous sommes passés récupérer Bruno et Pierre au CIF. Ce soir là, des arbitres étaient en train de passer leur examen écrit. Bruno me donne un QCM et me demande de le remplir. Puis arrive le moment de la correction, Pierre prend ma feuille et la corrige en direct. Et surprise, moins de 5 erreurs.
Ta carrière internationale va prendre fin en décembre (la carrière internationale d’un arbitre s’arrête à la fin de l’année civile de ses 55 ans), mais pas ta carrière en France. Combien de temps te vois tu encore arbitrer ?
Tant que je prendrai du plaisir dans l’arbitrage, parce que j’en prends, je continuerai.
Quelle doit être la principale qualité d’un arbitre pour toi ?
Être juste, Intègre, Esprit de décision, contrôle de soi, concentration, jugement et un très fort caractère.
Te souviens-tu de ton premier match arbitré ?
Oui mon 1er Match au CIF : C’était à LONGJUMEAU en remplacement d’un collègue qui s’était désisté.
Mon 1er match FFN c’était à Noisy le sec, à l’époque il jouait en N2. Joël COLCHEN, qui était chargé des désignations FFN a téléphoné, je pense à Bruno ou Pierre, pour savoir si j’étais prêt à siffler une rencontre FFN. Joël m’a ensuite téléphoné pour me demander si je pouvais aller à Noisy pour remplacer un collègue. Match difficile car dans l’eau, il y avait des joueurs et de très bons amis avec qui j’avais joué. Noisy a perdu cette rencontre d’un but…
Et ton premier match international ?
Mon premier match était un tournoi, Championnat d’Europe jeunes en Grèce. Un mois après mon passage d’examen en Turquie.
Il y a des matchs plus faciles que d’autres à arbitrer j’imagine. Est ce qu’il y en a un qui t’a marqué plus que les autres ?
A l’international, c’était lors d’une Demi Finale retour de LEN TROPHY, à Kotor. Au match aller Kotor avait remporté la rencontre face à l’Olympiacos, en Grèce, 4-5.
Le match retour s’annonçait difficile, j’étais avec un arbitre Slovaque Yann BOHAT et un délégué roumain GRINTESCOU. Le score à la fin de la rencontre retour fut 3-4 pour l’Olympiacos. Nous avons dû faire des prolongations « golden goal ». La rencontre s’est terminée avec une victoire de l’équipe Grecque d’Olympiacos après plus de 20 minutes de temps additionnel.
En France, c’était à Montpellier en janvier. Je devais arbitrer cette rencontre avec Pierre BONNAY. Pierre n’est jamais arrivé à Montpellier car de très grosses chutes de neige avaient bloqué les trains au départ de Paris. J’ai dû arbitrer cette rencontre seul. Au final, Marseille avait battu Montpellier 9-10.
As-tu une anecdote a nous raconter ?
Toujours à Montpellier et avec les mêmes équipes. Je devais être avec Pierre ou Bruno et Jean Claude DEMEY comme délégué. A quelques secondes de la fin du match (score 9-9), alors que Montpellier était en attaque, un de leur joueur shoot. Tout le monde, joueurs et public pensaient que le ballon était au fond des filets. Les joueurs se sont arrêtés de jouer, je refuse le but, contre-attaque des Marseillais shoot et but. (9-10)
La fin de la rencontre a été très tendue. Le délégué m’a demandé pourquoi je n’avais pas accepté le premier but. Je lui ai dit que j’étais sûr de la trajectoire du ballon et que jamais la balle n’avait franchi la ligne de but. Le ballon, lors du shoot du joueur de Montpellier était rentré petit filet et ressortit derrière le but. Après le match nous avons alors vérifié avec les vidéos des deux équipes et la vidéo de la Ligue. A l’époque la Ligue filmait une rencontre par journée de championnat. Après plusieurs minutes en présence des entraineurs et délégués d’équipes nous concluons que la décision prise était bonne. Le but de Montpellier n’était donc pas valable. Nous sommes remontés au traditionnel pot avec joueurs et public et à ce moment-là je me suis fait siffler. Le président M. SPILLAERT a alors pris le micro et il a annoncé à tout le monde que la décision prise par M.BOUCHEZ, après avoir, revu les vidéos était la bonne.
On remet souvent en cause l’arbitrage dans les matchs. Penses tu qu’il ait si souvent un rôle dans le résultat final ?
NON
Comment expliques-tu qu’il soit si souvent au cœur des débats ?
Très souvent, il faut trouver un coupable après une défaite. Alors l’erreur d’arbitrage ressort toujours en premier. Mais après analyse de la rencontre et la pression diminuée, la vidéo démontre souvent une autre réalité. Certes il y a eu des erreurs de la part des joueurs, des mauvais choix dans le coaching et des décisions d’arbitrages que l’on arrive souvent à accepter et tout au moins à comprendre.
On a coutume de terminer nos interviews par la question « Vachement con » : on sait que ta femme (Aurély Blanchard) est tout comme toi dans le milieu de l’arbitrage. Du coup, quelle serait votre soirée idéale : Resto en amoureux suivi d’un petit ciné, ou un bon match de Waterpolo suivi d’un pot d’après match ?
Alors, la même réponse pour nous deux, un bon match de water-polo que l’on aurait arbitré ensemble, suivi d’un bon restaurant. Pour le ciné, une vidéo d’un match que l’un ou l’autre aurait arbitré afin de continuer notre progression.
Aurély Blanchard : « Pour moi c’est bien évidemment un réel plaisir de siffler avec lui, même si ça n’arrive pas souvent ! Il m’a à peu près tout appris, c’est en quelque sorte mon maître ! Et moi l’élève ! Je suis bien sur encore dans la demande, car chaque week-end il y a toujours une situation qui demande confirmation ou pas ! Mais c’est aussi plus difficile d’arbitrer avec lui plutôt qu’un autre car je ne veux pas le décevoir, tout simplement, lui montrer que je peux être à sa hauteur même si je mesure 30cm de moins ! Mon rêve serait de siffler une finale Pro A hommes avec lui !!! Avant qu’il ne soit à la retraite. Quand on arbitre avec Pascal, on se sent en complète confiance, on a la sensation que rien ne peut arriver ! C’est un peu la force tranquille ! »
Benjamin Mercier : « Pascal fait partie de cette génération d’arbitres avec qui j’ai débuté ma carrière. On ne compte plus le nombre de rencontres sifflées ensemble. Beaucoup pensent que nous nous sommes souvent opposés sous prétexte d’une pseudo concurrence mais il n’en est rien. La vérité est que nous prenons un réel plaisir à nous retrouver à chaque nouvelle désignation. Arbitralement nous avons tous les 2 acquis des automatismes mutuels. Pas besoin de regarder ou il siffle : je sais ou se porte son regard et je sais d’avance ce qu’il va décider, je pense que l’inverse est également vrai. Pascal est un collègue sur lequel on peut compter en cas de difficulté et qui saura prendre ses responsabilités. La confiance envers son collègue est importante lorsque l’on aborde une rencontre difficile, une paire d’arbitres c’est avant tout une équipe. Arbitrer ensemble comporte cet avantage : on y gagne en sérénité…«
Grégory Courbin : « J’ai beaucoup appris aux côtés de Pascal. Un très bon arbitre de notre championnat et en international. C’est une personne à l’écoute avec qui je prends beaucoup de plaisir à siffler.«